Une victoire pour les peuples autochtones au Brésil
- Le Polémique
- 1 déc. 2023
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Par Vincent Bélanger
Au Brésil, la justice a été rendu aux peuples autochtones fin septembre dernier, et c’est une excellente nouvelle. Le jeudi 21 septembre 2023, des milliers d’Autochtones se sont rassemblés sur l’esplanade des ministres dans la capitale, Brasilia, afin d’entendre le verdict du « procès du siècle ». C’est sous une gigantesque tente, où étaient placés des écrans géants, que les peuples autochtones ont fièrement scandé leur victoire face aux lobbys agro-industriels et leur thèse du « cadre temporel ».
Ce jour-là, à la Cour Suprême, les 11 juges ont voté à majorité pour la reconnaissance légale des peuples autochtones à disposer de leurs terres ancestrales. Neuf d’entre eux ont voté « pour » tandis que deux ont voté « contre ». Sans surprise, ce sont les deux juges, qui ont été élus par le Président d’extrême-droite Jair Bolsonaro, dont la politique à l’égard des autochtones avait le goût de la répression.
La justice a donc refusé la thèse du « cadre temporel » défendu par les lobbys agro-industriels. Ce terme renvoie à l’idée que les autochtones avaient uniquement le droit de reconnaître les territoires qu’ils occupaient ou revendiquaient au moment de la promulgation de la Constitution de 1988. Il s’agit donc d’une avancée historique pour la survie de ces peuples et un frein aux industriels, dont les arguments ne sont plus en accord avec la réalité juridique actuelle.
Cette victoire rappelle aussi le bafouement historique subi par les Autochtones, surtout lors des vingt ans de dictature militaire (1964-1985) qui tua des milliers d’entre eux puis lors du mandat de Bolsonaro (2019-2022) dont les idées étaient dans la lignée de celles des militaires lors de la dictature.
Sur les 115 millions d’habitants que compte le Brésil, il reste difficile de recenser le pourcentage exacte des populations autochtones. Ils représenteraient un peu moins de 1% du total de la population. Malgré ce faible pourcentage, ils occupent 13% du territoire national et vivent majoritairement dans des réserves, délimitées par le gouvernement, mais qui ne sont pas toutes recensées ni bien protégées. Il y en aurait environ 700 au total, dont la grande majorité se trouve en Amazonie.
Ce verdict permet également de mettre en lumière la question de la déforestation, enjeu clivant et très politique chez les Brésiliens. La population est divisée tandis que les conséquences d’une telle déforestation sur la biodiversité de l’Amazonie et sur le changement climatique global ne sont plus à prouver. Selon le gouvernement brésilien, la déforestation a baissé de 22,3% en un an depuis l’arrivée du Président Lula en janvier 2023. Avec la déforestation massive, les territoires des peuples autochtones, originellement reculés, se sont rapidement retrouvés encerlé par l’exploitation agro-industrielle. Or, les terres autochtones sont un frein essentiel à la déforestation. En effet, ils constituent des réservoirs de biodiversité et contrent donc l’effet des changements climatiques. C’est pourquoi, la justice vient d’empêcher les exploitants de venir déforester ces terres protégées pour y imposer leurs cultures. Il s’agit donc d’une victoire sociale, écologique et climatique très importante, doublée par les efforts du nouveau gouvernement.
En effet, ce n’est pas la première grande avancée pour la reconnaissance des voix autochtones cette année. Parmi les nouveautés du gouvernement Lula, on compte la création du Ministère des peuples autochtones, une première dans le pays. Avec à sa tête, Sonia Guajajara, de la tribu des Guajajara, qui devient la première femme autochtone ministre dans l’histoire du Brésil.
Crédit Photo : AFP
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