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Par Vincent Bélanger
L’attaque du Hamas en Israël, le 7 octobre 2023, et la situation préoccupante dans la bande de Gaza qui dure depuis, continuent à faire craindre un embrasement des tensions dans tout le Moyen-Orient. Dans la nuit du 15 au 16 janvier dernier, des missiles balistiques provenant de l’Iran ont frappé la région du Kurdistan autonome d’Irak et la Syrie, faisant au moins quatre tués chez les civils et en blessant six autres.
C’est une vingtaine de missiles balistiques qui ont été tirés depuis le Sud-Ouest, le Nord-Ouest et l’Ouest de l’Iran visant les villes d’Erbil (Irak) et d’Idlib (Syrie). Les tirs ayant eu lieu de nuit, ont été revendiqués par les « gardiens de la Révolution », un groupe paramilitaire iranien, contrôlant une grande partie de l’Iran. L’Irak a immédiatement réagi en annonçant se sentir menacé et craindre pour sa souveraineté. Masrour Barzani, le Premier ministre du Kurdistan, alors en déplacement au Forum Économique mondial de Davos en Suisse, a annoncé craindre que la stabilité de la région se dégrade après ces frappes. Les jours suivants, des milliers de Kurdes ont manifesté en guise de protestation.
L’Iran, soutien du Hamas, s’est justifié en affirmant que les tirs visaient un site présumé d’abriter des espions et des terroristes soupçonnés de travailler pour le gouvernement israélien. L’Iran accuse aussi Israël d’être impliqué dans l’attentat kamikaze du 3 janvier ayant fait 90 morts à Kerman, une ville du Sud-Est de l’Iran, alors que l’État Islamique (EI) a pourtant revendiqué l’attaque. L’attentat a également tué plusieurs chefs militaires. L’ampleur de l’attaque laisse cependant croire qu’aucun des deux pays ne souhaite faire déborder la situation à Gaza dans le reste de la région.
Alors que la situation à Gaza impliquant le Hamas et l’État d’Israël a nettement détérioré les relations entre l’Iran et les États-Unis, l’un soutenant le Hamas, l’autre étant le premier allié de l’État hébreu, l’Irak se retrouve donc dans un jeu d’équilibre auquel il doit jouer avec prudence, étant à la fois allié de l’Iran et des États-Unis. En effet, la situation a poussé l’Irak et les États-Unis à réfléchir à l’avenir de la coalition internationale anti-djihadistes créée en 2014 pour combattre l’État Islamique. Le gouvernement irakien a proposé d’engager des discussions sur la mise en place d’un calendrier où seraient inscrites les étapes de réduction des effectifs. Aux côtés des États-Unis, d’autres pays comme la France et l’Espagne sont membres de la coalition et ont des soldats déployés en Irak pour assister et conseiller les troupes.
Ce sont des attaques revendiquées par des groupes pro-armés iraniens depuis octobre 2023 contre des soldats américains et d’autres soldats de la coalition. La riposte des Américains a poussé le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani a demandé un départ de la coalition. Il y a peu, des groupes de travail ont été mis en place entre Washington et Bagdad pour préparer le calendrier. Ils reviendront sur trois points principaux à savoir le niveau des capacités des forces de sécurité irakiennes, la menace que représente l’État Islamique ainsi que les exigences opérationnelles à entreprendre. En Irak, la plupart des partis parlementaires sont pro-Iran alors que le gouvernement ne veut pas abandonner ses relations avec Washington.
L’État Islamique semble ne plus être un danger sécuritaire pour l’Irak, ce qui expliquerait la décision de ne plus avoir besoin de la coalition. Le pays propose de mettre en place des relations bilatérales avec les pays membres de la coalition à la place de celle existante. Le maintien de bonnes relations avec les États-Unis et la volonté d’éviter une escalade des tensions semble pour l’instant être l’objectif maintenu par l’Irak, considérant que la sortie de la coalition internationale, si elle a lieu, se fera en plusieurs années. Le contexte des élections américaines de novembre prochain oblige aussi le gouvernement de Joe Biden à faire preuve de prudence dans ses relations diplomatiques s’il souhaite maintenir une bonne image face à son adversaire Donald Trump. De son côté, l’Iran n’a pas frappé à nouveau depuis cette nuit-là et n’indique pas pour l’instant vouloir viser particulièrement l’Irak dans ses actions.
Crédit Photo : Atlantic Council
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