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La planète bleue, pas si verte?


Photo : ASAAD NIAZI/AFP



Par Assia Mekawi


« Si tu me vois, commence à pleurer ». Cette inscription d’un autre temps, gravée en 1616 sur une Hungerstein, Pierre de la Faim en français, est aujourd’hui visible sur les rives de l’Elbe, en République Tchèque.

Normalement submergées sous l’eau du fleuve, ces pierres viennent rappeler que l’Europe a déjà subi les conséquences du manque d’eau dans le passé, et le sombre destin qu’on subi ses populations. Sécheresses, épuisement des ressources alimentaires, désertifications, famines, les conséquences du déficit d’eau sont nombreuses . Si la Terre est surnommée la Planète bleue car 70% de sa surface est recouverte d’eau, les problèmes liés à l’eau n’en sont toutefois pas absents. Le déficit n’est pas le seul danger qui pèse sur notre société. Les problèmes liés à l’eau sont nombreux.

Ces problèmes nécessitent une réelle prise de conscience des conséquences qu’ils entraînent et pourraient entraîner sur les populations, ainsi que leurs enjeux et les conflits qu’ils peuvent créer – allant même jusqu’à la guerre de l’eau-, et les solutions mises en place à différentes échelles pour permettre une meilleure gestion de l’or bleu.

L’eau est une ressource indispensable à la vie, elle est au cœur même des sociétés humaines, et permet de nous apporter les éléments existentiels à notre survie. Les organismes que l’eau abrite nous permettent de nous nourrir, d’étancher notre soif, ou encore de nous fournir de l’oxygène. Elle est également le pilier de notre économie, permettant la navigation et donc le transport de marchandises, les imports et les exports .

La consommation humaine mondiale d’eau par an s’élève à 24 millions de milliards de litres.

Cependant, 2 milliards de personnes n’ont pas accès directement à l’eau. Cette denrée est donc aujourd'hui un enjeu sanitaire, social et même culturel. L’eau est soumise à un stress hydrique, lorsque la demande en eau dépasse les ressources disponibles. Ce stress hydrique peut avoir des conséquences désastreuses pour la stabilité économique ou politique d’un état.

Les facteurs amplifiant ce phénomène sont une forte croissance démographique, l’urbanisation et le développement socio-économique.

Les pays du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord sont les plus touchés : ces régions présentent un climat chaud et aride, les ressources en eau sont faibles. À cela s’ajoute la demande croissante, et l’économie des pays en paient le prix.

La banque mondiale a constaté que d’ici 2050, le Moyen Orient subirait les plus grandes pertes économiques liées au climat, comprises entre 6 et 14% du PIB.

Chaque année, plus de 842 000 personnes meurent à cause du manque d’eau, d’assainissement et d’hygiène.

Toutefois, l’ONU reconnaît l’accès à l’eau comme un droit. En effet, la résolution 64/292 de l’ONU reconnaît « le droit à l’Eau potable et à l’assainissement sûrs et propres comme un droit de l’homme essentiel à la pleine jouissance de la vie et du droit à l’exercice de tous les droits de l’homme ».

En Europe, Venise, connue pour ses habitations sur pilotis et ses célèbres balades en amoureux à bord des gondoles, connaît elle aussi une sécheresse sans précédent. En effet, la sécheresse s’étendant sur plusieurs semaines à complètement modifié le paysage de la cité des Doges : les fondations des maisons autrefois immergées sont visibles, les bateaux ne peuvent plus naviguer car certains canaux devenus boueux sont à sec. Le Pô, fleuve le plus long du pays, a connu un déficit hydrique de 61%.

La chaîne de montagne des Alpes a vu 53% de neige en moins que la moyenne habituelle, d’après l’association écologiste italienne Legambiente.

La sécheresse est une menace pour l’agriculture et donc la production de nourriture. Ce fut le cas en 2010, lorsque les steppes Russes furent exposées à une sécheresse aggravée par des feux de forêts, ce qui a conduit à la chute des exportations de blé, et donc à l’augmentation des prix des produits comme le pain, menant à des révolutions, comme celle du Printemps Arabe.

De nos jours, le Kenya est lui aussi confronté à l’un des pires épisodes de sécheresse de son histoire. Celui-ci contraint le pays à avoir recours recours à l’importation pour couvrir ses besoins alimentaires. Les images de troupeaux dévastés, de buffles, d’éléphants et de girafes jonchant les sols craquelés des parcs nationaux ont fait le tour du monde. Cette sécheresse a causé la famine de plus de 4 millions d’habitants. Alors que la sécheresse menace d’accabler la faune et la flore au Kenya, ainsi que ses habitants, la montée des eaux est un phénomène qui prend de l’ampleur dans d’autres pays.

La fonte des glaces est la principale cause de la montée des eaux.

La montée du niveau des eaux salinise l’eau douce où vivent les poissons, qui ne parviennent pas à s’adapter à ces conditions. C’est le cas au Bangladesh, ce qui menace la pêche.

L’augmentation du niveau des mers et océans constitue une menace pour les populations des littoraux et pour les infrastructures, et lorsqu’elles sont touchées, les coûts économiques peuvent être énormes, comme ce fût le cas en Dominique avec les dégâts causés par l’ouragan Maria.

D’après le sixième rapport de la synthèse du GIEC, groupe d’experts de l’ONU pour le climat, 40% de la population mondiale vit dans des zones vulnérables au réchauffement climatique, soit entre 3,3 et 3,6 milliards de personnes présentent un risque 15 fois plus élevé de mourir d’inondations, de sécheresses et de tempêtes.

Les crises liées à l’eau contraignent les populations à se déplacer, et donc à migrer vers des lieux plus sûrs, entraînant des mouvements migratoires.

Parmi les solutions proposées pour lutter contre la précarité de l’eau et mieux gérer l’or bleu, on retrouve celle du site d’enfouissement du CO2 en mer du nord. Le projet Greensand est mené par INEOS, une société britannique spécialisée dans la chimie. D’ici 2030, il permettrait de stocker de manière permanente 8 millions de tonnes de CO2 annuellement dans un ancien gisement de pétrole, soit l’équivalent de 40% des émissions du Danemark. Le processus serait de capter le CO2 avant qu’il ne soit dans l’atmosphère, puis de le transformer en liquide avant de l’enfouir sous la mer à 1800 mètres de profondeur. Un accord entre la Belgique et le Danemark autorise le transport du CO2 liquide entre les frontières.

Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a déclaré: « C’est un grand moment pour la transition verte de l’Europe et pour notre industrie des technologies propres. »

Lors de la COP 15 qui s’est tenue à Montréal en décembre 2022, les dirigeants du monde ont décidé de protéger 30% des océans d’ici 2030.

Le GIEC soutient qu’il faut sortir au plus vite des énergies fossiles et accélérer la transition vers les énergies renouvelables pour contenir le réchauffement climatique à un niveau tolérable. Les énergies renouvelables ont par conséquent un rôle crucial à jouer.

Les infrastructures hydrauliques permettent de stocker ou de déplacer l’eau. On y retrouve principalement les châteaux d’eau, les barrages, ou encore les bassines de stockage.

En France, les méga bassines, ou « bassins de substitution » sont de gigantesques bassins d’eau remplis durant la période hivernale pour supporter l’agriculture, et permettre l’irrigation des cultures notamment durant la période estivale, et les périodes de sécheresse. La surface moyenne de ces structures est de 8m carré, les plus grandes pouvant aller jusqu’à 18m carré. Elles permettent ainsi de stocker l’eau pour l’utiliser en cas de nécessité. Cependant, l’idée est loin de séduire tout le monde.

En effet, ces bassines ne sont pas uniquement remplies en hiver par l’eau de pluie. Celle-ci étant insuffisante, des méthodes de pompages des cours d’eau ou des nappes phréatiques sont également utilisées, alors que les nappes peinent à se reconstituer en hiver. De plus, l’eau stockée est soumise à un fort taux d’évaporation, entre 20 et 60%.

En outre, celles-ci représentent une menace pour la biodiversité et les écosystèmes : en stockant l’eau qui sans stockage se serait infiltrée dans les sols, elles privent les écosystèmes d’une ressource vitale, faisant ainsi planer la menace de leur extinction.

Par ailleurs, ces bassines viennent renforcer le modèle agro- économique si problématique pour l’environnement, en accentuant la pression sur l’eau, et en perpétuant la chaîne de la puissance industrielle, permettant ainsi aux grandes exploitations de tirer profit au détriment des agriculteurs locaux. Cette méthode vient remettre en cause le fait que l’eau est un bien commun, car dans le cas-ci elle est utilisée par des industriels.

Il existe un autre moyen de limiter l’utilisation de l’eau pour produire notre nourriture.

Vous en avez certainement déjà entendu parler, et peut-être vous a-t-elle répugné, horrifié, ou encore dégoûté. Il s’agit de la consommation d’insectes. Le régime alimentaire s’appelle l’entomophagie. Les insectes sont déjà présents dans notre alimentation. La cochenille, par exemple, est présente en poudre ou en colorant dans notre alimentation.

Les insectes n’ont pas besoin de beaucoup boire ou manger, contrairement aux vaches, et la production d'hectares de blé, maïs et soja nécessite beaucoup d'eau.[KN3]

Le 4 mars 2023, le traité international sur la haute mer a été signé, après plus de 15 années de discussions par les états membres de l’ONU. Ce traité vise à protéger les eaux de la haute mer, et par conséquent toute la biodiversité qu’elle abrite. La haute mer commence là où s’arrête la zone économique exclusive d’un état. Elle n’est donc sous la juridiction d’aucun état et n’appartient à personne. Ce traité permettra de créer des zones protégées dans les eaux internationales. Celles-ci ayant longtemps été négligées au profit de la surpêche et au détriment de sa biodiversité microscopique.

À l’occasion de la journée mondiale de l’eau, qui se tient chaque année le 22 mars, des actions de prévention sont menées pour sensibiliser à l’importance de l’eau douce, pour inciter à agir à toutes les échelles.


Sources:



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