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La négligée des Accords Camp David

Dernière mise à jour : 3 nov. 2023

Par Emma Barralon-Papais et Erine Le Curieux-Belfond


À la fin des années 1970, la volonté d’Anouar el-Sadate, le président de la République Arabe d’Égypte, de vivre en paix avec Israël est à son paroxysme. L’idée de Yasser Arafat, président de l'Organisation de libération palestinienne (OLP), d’unir les Palestiniens sous un même État reconnu est vitale. Les premiers ministres israéliens qui se succèdent, mettent toujours en avant leurs intérêts nationalistes. L'administration américaine œuvre pour démontrer toujours plus au monde ses capacités de médiatrice. Cela révèle l'implication des différents acteurs régionaux et internationaux dans le processus de paix au Moyen Orient et dans les dynamiques d’influence et de pouvoir, ainsi que dans l'intégration inégale aux différentes discussions.


Le sommet de Camp David qui se tient en 1978, est à l’origine de cet idéal de paix prometteur.

Jimmy Carter, président des États-Unis, souhaite démontrer la volonté des États-Unis à maintenir un monde pacifié, notamment à maintenir la paix au Moyen-Orient. Il propose donc en 1978, une rencontre secrète dans sa résidence de vacances à Camp David dans le Maryland, entre, Anouar el-Sadate, et le premier ministre israélien, Menachem Begin. Carter présente le sommet comme une

rencontre qui traitera principalement du conflit israélo-palestinien, un conflit qui déchire les relations entre Israël et ses voisins. Les négociations secrètes durent douze jours, et les deux accords finaux signés et acceptés par les deux partis en 1979, annoncent qu’Israël rendra le Sinaï à l’Égypte,

qu’en échange cette dernière donnera l’autorisation à Israël d'utiliser le canal de Suez à des fins


commerciales, et finalement que l’État égyptien reconnaîtra l’État d’Israël comme tel. Le premier

accord de Camp David peut être considéré comme un succès, pourtant il ne bénéficie pas

équitablement à tous les acteurs. Derrière cet accord de paix se cache un rapport de puissance à la

défaveur de l’Égypte, mais surtout des Palestiniens. L’aide financière délivrée par les États-Unis à

l'Égypte et à Israël à l’issue de cette discussion est une des causes des différends entre l’État d'Israël

et la population palestinienne. Le financement a contribué à l’achat de matériel militaire, facilitant

l’invasion et l'occupation du territoire palestinien. Effectivement, l’accord est déjà perçu comme un

échec pour les Palestiniens car ils n’ont été aucunement inclus dans cet accord. Pourtant, à la veille

des négociations, selon les deux signataires des accords, la discussion du conflit israélo-palestinien

était trop importante pour ne pas être abordée. La pacification de la région, pour les Palestiniens,

est directement reliée au règlement du conflit entre les deux bords, donc aborder cette question lors

de la rencontre de Camp David paraissait inévitable. Au début des années 1990, les intérêts des Palestiniens commencent à être pris en compte dans les processus de paix effectués dans la région, sans pour autant obtenir un succès triomphant. Les Accords d’Oslo en 1993, sont un pari sur la réussite d’un processus de paix qui mise sur l’instauration d’une confiance mutuelle entre Israël et les Palestiniens, et qui pose les prémices d’une potentielle création d’un État Palestinien. Née des négociations menées lors des accords, l’Autorité palestinienne est l’instance qui succède à l’OLP, toujours présidée par Yasser Arafat. Le réel espoir à l'issue des accords d'Oslo s'est rapidement effondré. Effectivement, le retard pris par les forces israéliennes à se retirer des territoires palestiniens occupés a sapé la confiance précédemment instaurée et causé l’émergence de violences. Vingt-deux ans après le premier sommet de Camp David, le président Clinton poussé par le premier ministre israélien, Ehud Barak, relance l’idée de faire une rencontre avec Yasser Arafat, dans l'optIque de conclure enfin un accord de paix durable entre Palestiniens et Israéliens et renverser les tendances jusqu’à présent négatives. Pour autant, la requête américaine d’effectuer un sommet Camp David II, n’est pas acceptée d’office par le représentant Palestinien qui est suspicieux de cette iniative. Les deux parties étaient conscientes que le conflit ne s’arrêterait pas radicalement après la rencontre de deux semaines. S’affrontent un leadership palestinien faible et un leadership israélien confiant. Malgré le fait que Yasser Arafat perd petit à petit sa popularité, il se présente tout de même à Camp David en tant que porte-parole de la population palestinienne. Sa stratégie défensive basée sur le strict respect du droit international, met en avant les droits fondamentaux des Palestiniens. Ils espèrent que les Israéliens vont rendre la pareille face aux concessions territoriales qu’ils ont effectuées par le passé. Arafat ne compte pas céder quant aux enjeux du statut de Jérusalem et la question des réfugiés palestiniens. En face, Barak sait pertinemment qu’il sera avantagé par son allié, le médiateur américain, il prend donc ses distances pour éviter des négociations poussées. Il préfère envoyer des propositions par le biais des États-Unis dans le but d’engranger le plus de concessions de la part du représentant palestinien. Cela va faire défaut à la communication entre les deux acteurs qui vont s’accuser mutuellement d'être venus à Camp David sans véritable volonté d’établir une paix durable. On est alors bien loin de l’idée libérale de “confiance mutuelle” et de “réciprocité”, qui étaient visibles lors des accords d’Oslo. La énième proposition américaine, n’accordant aux Palestiniens qu’une faible souveraineté sur Jérusalem Est, sans prendre en compte les besoins de ces derniers, est drastiquement refusée par Arafat. Les deux dirigeants arrivés avec des stratégies de négociations différentes se séparent, sans accord, avec des positions encore plus distantes.


Le sommet Camp David II a échoué à maintenir la paix dans la région et entre les deux parties. En résultat de cette rencontre, aucun accord n’a été produit, la deuxième intifada a explosé, une guerre au sein des territoires occupés a explosé et l’effondrement de l’autorité palestinienne était palpable. De plus, la montée en puissance d’Ariel Sharon en Israël, qui rejetait totalement l’idée qu’un État palestinien existe et vive, s’est ainsi ajouté à la politique pro-israélienne de Clinton.


Crédit photo : Roger-Viollet


Sources :


Al-Husseini, Jalal, Et Riccardo Bocco. « Les Négociations Israélo-Palestiniennes De Juillet 2000

À Camp David : Reflets Du « Processus d'oslo » », Relations Internationales, Vol. 136, No. 4,

2008, Pp. 51-72.

Lustick, Ian S. “‘Camp David Ii: The Best Failure And Its Lessons.’” Israel Studies Bulletin 16,

No. 2 (2001): 1–7. Http://Www.Jstor.Org/Stable/41805448.

Rosenberg, Rochelle-Leigh, « Why Camps David Ii Failed : A Negociation Theory Perspective »,

2011 Https://Www.Hnlr.Org/Wp-Content/Uploads/Sites/22/2012/03/Rosenberg-Negotiation-

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Salameh, Salameh, Al-Shra'h, « The Camp David Accords : Lessons And Facts », The Arabe

Jornal For Art, 2012. Https://Aauja.Yu.Edu.Jo/Images/Docs/v9n2a/v9n2ar11.Pdf

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