La Coupe du Monde de Football 2022 au Qatar: un mondial aux multiples polémiques

Par Emmy Vande Rosieren

Photo: The Guardian

À quelques semaines de l’ouverture de la Coupe du Monde de soccer, celle-ci suscite de nombreuses polémiques. Entre son impact écologique et sa violation des droits humains, l’heure n’est pas à l’excitation, mais bien au boycott. Parmi l’Australie, le Japon, la Corée du Sud et les États-Unis, il serait pertinent de se pencher sur les raisons qui ont fait basculer la compétition dans un pays comme le Qatar.

La décision date d’il y a dix ans, où Sepp Blatter, ancien président de la FIFA, reconnait que dans les faits, le Qatar avait « le plus mauvais dossier technique de tous les candidats ». Mais alors pourquoi ce choix ? Les pays organisateurs de la coupe du monde sont décidés lors d’un vote. Depuis le mondial de 1982, le privilège de sélectionner le pays organisateur est réservé aux 24 membres du comité de la FIFA, un cercle très fermé. La corruption est alors à l’origine de ce choix. D'abord, à trois semaines du vote, le Qatar décide d’octroyer 100 millions de dollars à la FIFA, ainsi que 200 000 dollars à chaque votant. Le Qatar est notamment suspecté d’avoir acheté pour 22,6 millions les votes de 15 membres du comité. Trois différentes enquêtes sont menées par les États-Unis, la France et la Suisse quant à ces suspicions. Le FBI américain a notamment pu prouver que le dossier des États-Unis pour le mondial de 2022 a été mis à l’écart en raison de la corruption organisée par le Qatar. La deuxième enquête fut menée par la France afin d’évaluer l’ampleur de la corruption ciblant Nicolas Sarkozy. Enfin, la troisième enquête fut mené par la suisse, sur la base d’une plainte pour « blanchiment d’argent et gestion déloyale ». Malgré ces enquêtes le choix du Qatar n’a jamais été remis en question enfin jusqu’à maintenant.

Un mondial, ou plutôt une catastrophe écologique ?

Dix ans plus tard, de nombreuses polémiques éclatent concernant la compétition de 2022, l’événement le plus attendu après les Jeux olympliques. En effet, le bilan humain et environnemental remet en question l’essence même du football. Le Qatar et sa chaleur étouffante, atteignant souvent les 37 degrés Celsius, s’est muni de stades climatisés à ciel ouvert. Il faut rappeler que le Qatar détient le record mondial d’émissions de CO2 par habitant selon le classement du Global Footprint Network. Malgré l’usage de panneaux photovoltaïques, l’inquiétude est plus portée sur le message envoyé au monde dans une période « d’économie d’énergie ».

Le deuxième problème est porté sur l’utilité des stades. En effet, pour la plupart d’entre eux, il a été annoncé qu’ils ne seront pas réutilisés pour d’autres usages à l’avenir. L’impact écologique lié à la construction des stades ne saura donc pas amorti avec le temps. La plupart de ces stades, construits dans un rayon de 15 kilomètres, finiront par être démontés. Le Qatar se défend sur la proximité des stades en avançant l’intention de réduire les déplacements des spectateurs entre les matchs. Or, il faut noter que le Qatar n’a pas la capacité hôtelière d’accueillir tous les visiteurs, et ce sont donc des États voisins du Golfe qui se chargeront de leur accueil. À cette occasion, cinq compagnies du Golfe ont déjà annoncé autour de 160 vols par jour en direction de Doha, la capitale du pays hôte. Le rapport de la FIFA de 2021 démontre que le Qatar devrait produire 3,63 millions de tonnes de dioxyde de carbone liés à la préparation de la Coupe du monde. Ce chiffre est pourtant critiqué par les experts car il ne prendrait pas en compte la construction des stades.

La FIFA et la négligence des droits humains

La violation des droits humains s’ajoute au désastre écologique. En effet, d’après le quotidien The Guardian, 6500 travailleurs immigrés, de l’Inde, du Pakistan, du Népal, du Bangladesh et du Sri Lanka seraient morts au Qatar depuis 2010 sur le chantier de la Coupe du monde. S’ils ne meurent pas sur le chantier de la Coupe du monde, un bon nombre d’entre eux se retrouvent expulsés de leur domicile. Leurs logements seraient jugés insalubres, alors qu'en réalité, ceux-ci sont réquisitionnés afin de loger les supporteurs du mondial. Mis à part le traitement discriminatoire des travailleurs, les conditions d’accueil des supporteurs amènent également à certaines réflexions. Le Qatar présente la compétition dans un document comprenant six chapitres et seize pages, dans lequel il est rappelé que les visiteurs devront par exemple porter des vêtements qui couvrent les épaules et les genoux. Autrement dit, les vêtements transparents, trop serrés ou trop courts sont strictement interdits pendant la compétition. Il sera déconseillé de porter des bijoux, et seules les montres et alliances de mariage seront autorisées. À noter qu’une distance devra également être respectée entre les hommes et les femmes. Malgré le caractère festif de la coupe du monde, il sera interdit de consommer ou de vendre de l'alcool dans un espace public.

Il est pertinent de dire que le Qatar a réussi son pari d’intégrer le système mondial à travers les sports. La Coupe du monde de 2022 permet de diffuser à grande échelle la stratégie de communication de l’émirat. Les stades se présentent comme des vitrines marketing. Malgré les polémiques liées à l’écologie et aux droits de l’homme, il est important de souligner l’hypocrisie des pays occidentaux. En effet, n’est-ce pas aberrant de s’étonner à la veille de cette tant attendue compétition d’une décision prise il y a dix ans ? Nous devrions sans doute nous intéresser aux choix de la FIFA pour le mondial de 2030.

Sources

AFP, Libération et. 2022. Droits humains Qatar : des centaines de travailleurs migrants expulsés de leurs logements avant la Coupe du monde . 2022. «Entretien. "Boycotter le mondial ? c'est l'hypocrisie la plus totale.» Ouest France.

Laspière, Victor Tribot. 2022. «Pourquoi la coupe du monde au Qatar fait-elle polémique sur le plan écologique ?» France Bleu.

Libois, Erik. 2022. «Voici comment le Qatar a obtenu la coupe du monde 2à22: plongée au coeur de l'espionnage, du népotisme et des pots-de-vin.» rtbf.be.

Magoariec, Raphaël Le. 2022. Les stades de la coupes du Monde é022, reflets d'un Qatar à deux vitesses. Open Edition.

Occhipinti, Steeven. 2022. «Nouvelle polémique avant la coupe du monde 2022 au Qatar.» 90 min.